dimanche 23 octobre 2011

Un grand muséologue

Peter van Mensch est probablement l'un des plus importants muséologues au monde. Entré à la Reinwardt Academie (affililiée à l'Ecole des Beaux-arts d'Amsterdam) en 1982, après une première carrière dans le monde des musées d'histoire naturelle, il vient de prendre sa retraite cette année. Homme passionné, marié à une muséologue reconnue (Léontine van Mensch), il continuera forcément de s'investir longtemps dans le développement de la discipline qu'il a contribué à façonner. Sa thèse de doctorat, présentée en 1992 à l'université de Zagreb sous la direction d'Ivo Maroevic, portait sur la méthodologie de la muséologie. Ce fin spécialiste de la muséologie scientifique, telle qu'elle était enseignée dans les pays de l'Est, fut le premier à présenter une réelle synthèse des différents courants de la muséologie, tant à l'Est qu'à l'Ouest. Peter van Mensch, qui a enseigné dans de très nombreux pays, a publié plus d'une centaine d'articles, dans une quinzaine de langues. S'il connaît la littérature francophone, il a en revanche relativement peu publié en français, mais sa maîtrise de l'anglais lui a en revanche ouvert les portes de la reconnaissance internationale.

La vidéo présentée ici reprend une intervention en anglais lors d'un colloque à Amsterdam, en juin 2010. Titre de l'intervention: "Une œuvre d'art dans un musée est une œuvre d'art dans un musée", référence à la phrase célèbre de Kenneth Hudson: "un tigre dans un musée est un tigre dans un musée, et pas un tigre". Si les étudiants de la Reinwardt Academie comprenaient vraiment cette phrase, ils recevraient leur diplôme immédiatement dès leur entrée, remarque van Mensch.En ce qui me concerne, il m'a fallu une bonne dizaine d'années pour tirer toutes les conclusions d'une telle assertion. 




mercredi 19 octobre 2011

Hommage à Henri Focillon

« Mes élèves me considèrent avec des yeux ronds. J’ai passé mes premières séances à leur expliquer qu’une idée n’est pas une surface, messieurs, mais un volume doué de plusieurs dimensions. On ne la parcourt pas seulement en long et en large, mais en hauteur, en profondeur, de tous les côtés. Il y a aussi l’envers des idées. Il faut voir chacune de leurs faces. Quelques idées ont autant de facettes que les yeux d’un papillon – environ quatorze millions. Il faut se promener autour de ces polyèdres. Voilà, messieurs, ce que l’on appelle avoir le sens des nuances. Sans le sens des nuances, vous croirez ce que disent les journaux, vous pleurerez et vous rirez au théâtre, stupidement. Vous mépriserez ou vous adorerez en bloc. Vous serez des barbares. »

Henri Focillon, lettre à ses parents. Cité par Thomine A., « L’enseignant. Quelques idées ont autant de facettes que les yeux d’un papillon », in Briend Ch., Thomine A., La vie des formes. Henri Focillon et les arts, Paris, INHA, 2003, p. 155.

 
L'oeuvre de Focillon mérite d'être lue et relue. Les quelques rares écrits de l'auteur sur les musées témoignent d'une intelligence rare et d'un sens particulièrement aiguisé de l'appréciation du sens du musée. La carrière de Focillon dans les musées fut malheureusement relativement brève, puisqu'il quitta assez rapidement Lyon pour Paris. C'est sans doute un réel dommage pour le monde des musées français, même si celui de l'histoire de l'art universitaire allait pouvoir grandement en bénéficier.